de François Dupeyron
France, 1h32, 2007.
Sélection officielle festival de Toronto 2008, festival de Rome 2008 et prix d’interprétation féminine au Festival de Tokyo 2008 pour Félicité Wouassi.
Sortie en France le 26 novembre 2008.
avec Félicité Wouassi, Elisabeth Oppong, Claude Rich, Mata Gabin, Ralph Amoussou, Fatou N’Diaye.
Une comédie à la fois joyeuse et un peu grinçante qui nous emmène en banlieue parisienne partager le quotidien d’une femme qui force son destin à pencher du bon côté.
Les Mureaux est une banlieue ordinaire de Paris où la vie n’est pas toujours rose pour ceux qui doivent y vivre. Au-delà des images sensationnelles véhiculées par les médias, le réalisateur français François Dupeyron nous y fait vivre une tranche de vie sur le mode doux amer de la comédie réaliste. Pour lui, les banlieues sont « des zones où on va quand on fait de la fiction pas seulement parce qu’elles sont à problèmes, mais parce qu’elles sont indéfinies, riches de non-dits, et d’une jeunesse qui ne se reconnaît pas ailleurs. » Mais poser simplement sa caméra aux pieds des barres demande un minimum de préparation : « La cité, on n’y rentre pas comme ça. C’est la réalité. Il y a des médiateurs qui font le lien. Dans les cités vivent des gens qui se retrouvent en marge, comme coupés du monde. Si on arrive de l’extérieur, la réaction est violente (…) Les Mureaux se sont avérés être un décor très juste, parce que pas trop emblématique. Clichy sous Bois, par exemple, est une cité « très esthétique », mais justement, ça ressemble tellement à ce qu’on attend qu’on tombait dans le cliché. »
Dans ce décor très réaliste, et donc loin des clichés, François Dupeyron pose de la fiction. En l’occurrence, le portrait très réussi et attachant de Sonia, une mère de famille qui se débat 24 heures sur 24 pour donner une vie décente à ses 4 enfants et pense y réussir. En vrai, chez Sonia, c’est la panique totale et le désordre pas toujours joyeux. Sa fille aînée doit se marier, le second est au poste de police, la troisième au fond de son lit et le petit dernier s’amuse à des jeux dangereux pendant que la mère trime à la laverie. Le mari est un incapable, la copine de cœur une coiffeuse délurée ! Ca crie, ça rigole, ça pleure, la vie déborde de partout dans les journées de Sonia. D’autres auraient vite sombré dans la déprime et le défaitisme, pas elle. Sonia pense toujours, et dans les pires moments que lui font vivre ses proches, « qu’on va trouver une solution » et que « Dieu est là pour nous aider ».
Portée par la vitalité, la grâce et le charme de Félicité Wouassi, ce qui lui a valu un très mérité prix d’interprétation féminine au Festival de Tokyo, Sonia bouscule la vie. Elle bouscule ses enfants, ses voisins, son destin. On rit, les situations sont cocasses, voir rocambolesques. Mais, comme souvent dans les films de François Dupeyron, le drame n’est jamais très loin. Pas le drame extraordinaire du cinéma à effets spéciaux mais les drames ordinaires de la vie, où chacun peut se reconnaître. Les jeunes pour qui dealer de la drogue est juste un moyen de se faire de l’argent de poche, les factures qu’il faut payer, les situations où on se fait piéger par plus malin que soi, les humiliations qu’il faut supporter pour garder son travail et les enfants qui s’échappent pendant ce temps-là .
Sonia, mère ordinaire dans une banlieue ordinaire, est avant tout une femme, avec ses désirs, ses secrets, sa soif de tendresse et ses rêves d’un monde meilleur, plus calme et plus juste. Sonia, dans son appartement chaotique des Mureaux, est une femme d’aujourd’hui, belle et courageuse, qui redonne une dignité à toutes les femmes. Avec une distribution brillante d’excellents comédiens et un ton juste, loin de tout misérabilisme ou jugement, Aide-toi, le ciel t’aidera permettra sans doute à ceux qui ne se reconnaissent jamais au cinéma d’y trouver une part d’eux-mêmes.
Magali Van Reeth