d’Agnès Varda
France, 1h50, 2007.
Sortie en France le 17 décembre 2008.
documentaire autobiographique.
Documentaire autobiographique d’une pétillante vieille dame de 80 ans qui a accompagné l’histoire du cinéma français depuis plus d’un demi siècle.
Documentaire ? Album de souvenirs ? Collage animé ? Autobiographie ou testament ? Il y a un peu de tout dans Les plages d’Agnès, comme on trouve d’ailleurs un peu de tout sur le sable après la marée : bouts de bois, morceaux de verre dépoli, ficelles usées, traces de pas, reste de châteaux qui font vite un poème à la Prevert. Agnès Varda nous dit ce 20ème siècle qu’elle a parcouru presque depuis le début. Elle le dit avec des vieilles photos, avec des cartons peints, une installation de bassines en plastique coloré, des extraits de films, tout un jeu de miroirs. La première scène du film est réellement construite sur des miroirs qui reflètent l’eau de la mer, le bleu du ciel et le visage de ceux qui travaillent avec elle. Très belle mise en abîme de la fluidité des paysages, de l’immensité prise au piège du cadre par l’artiste. Evocation sublime et esthétique du temps qui passe, plus vite pour l’homme que pour la nature. Magnifique mise en scène d’une réalisatrice qui cherche à regarder derrière elle, là où il n’y a plus rien, rien que des souvenirs et des émotions toujours aussi fortes. Mais depuis Proust, qui lui aussi affectionnait beaucoup les plages, on sait bien que la vraie vie réside dans ces souvenirs et la force des émotions que nous pouvons encore éprouver.
Jeune fille très bien rangée à qui la guerre fait découvrir les joies du déménagement et la vie au soleil. Une époque inouïe où non seulement les enfants traînaient dans les rues mais où en plus les artisans qui y travaillaient en profitaient pour leur transmettre leur savoir. Et voilà Agnès, qui s’appelait encore Arlette, sachant raccommoder les filets de pêche. Ce qui est très utile pour partir en vacances et s’émanciper un peu de sa famille nombreuse. Puis étudiante insouciante, elle choisit la photographie, comme une gourmande choisit entre une religieuse et un macaron à la pâtisserie.
L’autobiographie est citée par Salman Rushdie comme l’un des 10 pêchés capitaux du monde contemporain. Celle d’Agnès Varda évite la plupart des lourdeurs de cet exercice grâce à la légèreté de ton. Pas de complaisance envers sa personne, pas de larmes lorsque les disparus sont évoqués, notamment son compagnon et cinéaste lui-aussi, Jacques Demy. Avec pudeur, Varda évoque la rupture, la maladie. Avec fantaisie, elle parle d’une époque qui n’existe plus et qu’un simple morceau de carton découpé en forme de voiture permet d’évoquer. A quoi rêve t-elle aujourd’hui ? Retourner dans le ventre de la baleine, tel Jonas ? Aussitôt, la baleine apparaît sur la plage et c’est une baleine si confortable qu’on comprend aisément pourquoi Varda est venue nous dire au revoir avant de nous quitter.
Magali Van Reeth