de Michael Haneke
Autriche/Allemagne/France/Italie, 2h24, 2009.
Palme d’or au Festival de Cannes 2009, mention du prix du Jury œcuménique.
Sortie en France le 21 octobre 2009.
avec Christian Friedel, Suzanne Lothar, Reiner Bock, Leonie Benesch.
Palme d’or au dernier Festival de Cannes, ce film grave et lumineux revient aux sources même de la violence des êtres humains. Il soulève beaucoup de questions que chaque spectateur doit résoudre « en son âme et conscience ».
A travers ces films, le réalisateur autrichien Michael Haneke traque inlassablement les origines de la violence des hommes. Violence incompréhensible et atroce comme dans Funny Games (1998) ou banale et quotidienne dans Code inconnu (2000), toujours déroutante et malsaine à la façon de La Pianiste (2001). La violence est source de conflits, à la fois origine et prolongement des guerres armées, comme le montre Caché (prix œcuménique au Festival de Cannes en 2005).
Avec Le Ruban blanc, Michael Haneke affine encore cette quête, et montre le lien entre l’éducation prônée par une société, une religion, un pouvoir et les dérives perverses que cela peut occasionner chez ceux qui la reçoivent, avant de la transmettre à leur tour. Le film se déroule dans un village rural et protestant du nord de l’Allemagne, à la veille de la Première guerre mondiale. Quelques hommes – rien que des hommes – disposent d’un certain pouvoir sur toute la communauté : le baron, le régisseur, le docteur, le pasteur et l’instituteur. Avec les meilleures intentions et certains de leur droit, ils exploitent, forment, éduquent, utilisent, soignent ou abusent les paysans, les domestiques, les femmes et les enfants.
Tourné en noir et blanc, à la limite de la saturation, le film met le spectateur en état de déroute, d’instabilité et d’éblouissement. Les scènes se succèdent avec des raccords et des ellipses tour à tour ironiques ou cruelles. Les plans lumineux sont parfois chargés de monstruosité, les nuits sont propices à la vengeance et très vite, le soupçon détruit toute idée de bonté et d’innocence. Le film est déroutant parce qu’il ne donne aucune piste au spectateur sur les responsabilités et culpabilité de chacun. Sans doute pour affirmer encore une fois que la violence est tout autant une affaire intime que celle de tout un groupe. La violence de la communauté influence le devenir des individus qui la compose mais chacun d’entre eux a sa part dans l’avènement de cette violence.
Film magistral par sa forme et par les interrogations qu’il soulève, il dénonce les perversions d’une société qui n’existe plus mais dont l’écho habite toujours notre siècle. Au Festival de Cannes 2009, Le Ruban blanc a reçu la Palme d’or et une mention du Jury œcuménique.
Magali Van Reeth
Signis