de Mamoru Hosoda
Japon, 1h54, 2009.
Sélection officielle Berlinale 2010 et Festival du film d’animation d’Annecy 2010.
Sortie en France le 9 juin 2010.
film d’animation
Un très beau film d’animation où, pour une fois, les jeux vidéos ne sont pas infantilisés : ils vont même servir à sauver l’unité familiale. Les « numéridés » apprécieront !
Les numéridés ? Ce sont ces jeunes gens nés dans les années 1990 qui ont toujours vécu dans le halo bleuté d’un écran d’ordinateur. Connectés avec leur premier biberon, tous leurs souvenirs sont archivés dans un monde virtuel où ils sont tout à fait à l’aise. Ils n’ont pas besoin de mode d’emploi pour utiliser leur nouveau portable et ne se déplacent jamais sans de petits rectangles brillants pour écouter de la musique. Aussi, avant de leur parler, il faut vérifier s’ils n’ont pas un écouteur dans l’oreille. Ils peuvent pianoter un sms sur leur téléphone tout en jouant à l’ordi, un autre œil sur la télé qui passe leur série américaine préférée !
Summer Wars les met à l’honneur. Non pas un film sur eux comme objet de curiosité de la part d’une société qui ne les comprend pas vraiment – tout en les ayant engendrés – mais un film avec eux. Un film remarquable qui utilise tous les codes de la fiction classique, avec une véritable écriture cinématographique. Une intrigue, de l’émotion, un peu de frayeur et une famille à la fois typiquement japonaise et terriblement universelle dans ses tensions et ses usages. Un film sur la transmission mais aussi sur un équilibre retrouvé entre un monde ancien et le monde nouveau qui se construit sous nos yeux.
A l’occasion des 90 ans de leur l’aïeule, toute la famille Jinnouchi se réunit dans sa maison, une magnifique propriété à la campagne. Natsuki est sa petite-fille et elle est lycéenne, assez grande pour qu’on commence à vouloir la fiancer. Pour éviter les discussions, elle « embauche » un de ses camarades de classe, le gentil Kenji, pour jouer le rôle du soupirant. Situation qui va provoquer de nombreux quiproquo dans cette famille où les personnalités sont très marqués. Par affection pour la grand-mère, il faut respecter certaines coutumes ancestrales et laisser la place aux aînés. Mais grâce à un événement imprévisible, la jeune génération – et sa capacité à coloniser des mondes inconnus – va montrer ses talents et redonner du sens à la famille.
A l’inverse de beaucoup de films d’animation japonais, Summer Wars s’ancre vraiment dans le Japon, tissant subtilement la complexité d’une société fortement ancrée dans la tradition tout en acceptant une modernité décoiffante. Le graphisme est très beau dans les scènes « réelles » où vit toute la famille, proche de l’esthétique japonaise, tout en élégance et simplicité. En revanche, dès qu’on passe dans le monde virtuel, c’est tout l’univers des « manga » qui explose à l’écran. Mais Mamoru Hosoda, le réalisateur, évite le travers de ces dessins animés japonais commerciaux qui, aplatissant le graphisme dans une esthétique qui occidentalise le Japon, sombrent dans une horripilante mièvrerie. C’est un vrai plaisir pour les yeux et, du coup, les scènes de jeux vidéos passent beaucoup mieux
Par la complexité de son scénario, ce film d’animation ne s’adresse pas aux très jeunes enfants mais ravira tous les autres spectateurs à partir de 10/12 ans. C’est le film idéal à proposer aux pré-ados et à aller voir avec eux pour qu’ils donnent quelques clés de lecture !
Magali Van Reeth
Signis