d’Olivier Masset-Depasse
Belgique/Luxembourg/France, 1h35, 2010.
Festival de Cannes 2010, Quinzaine des réalisateurs, prix de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, SCAD.
Sortie en France le 13 octobre 2010.
avec Anne Coesens, Essé Lawson, Alexandre Gontcharov.
Dans le monde occidental soucieux de garder ses richesses, les reconduites aux frontières de clandestins sont une question épineuse qui pose un grave problème de société. La richesse, la démocratie et la prospérité sont-elles des freins à la solidarité et au partage ?
Dans son nouveau film, Olivier Masset-Depasse choisit la fiction pour en parler. Le personnage principal, Tania, est originaire des pays de l’Est et réside clandestinement en Belgique depuis plusieurs années avec son jeune fils. Arrêtée dans la rue, elle passe de longs mois dans un centre de détention, en bordure d’un aéroport international. A travers son parcours, le réalisateur s’attaque surtout à la violence subie lors des reconduites forcées aux frontières.
Ces dernières années, de nombreuses associations dont la Cimade (association œcuménique de solidarité active avec les migrants, les réfugiés et demandeurs d’asile) ou Forum réfugiés (collectif œcuménique d’associations pour la défense du droit d’asile), ont souvent dénoncé les conditions épouvantables dans lesquelles sont maintenus les clandestins dans des centres de rétention.
Illégal rappelle, en suivant le parcours de Tania une fois arrêtée par la police belge, cette violence de la détention dans une zone où il est difficile de faire valoir ses droits et qui ressemble surtout à une prison. Là , les clandestins sont traités comme des malfaiteurs alors que souvent leur seul délit est d’avoir franchi une frontière sans les autorisations nécessaires. Pour avoir voulu une vie décente (dans tous les sens du terme), ils sont humiliés, harcelés, encadrés par du personnel débordé qui en vient lui-même à perdre tout repère éthique. A travers la caméra d’Olivier Masset-Depasse, les occupants de ces centres ressemblent à des insectes attirés par la lumière d’un lampadaire et qui, piégés par le verre, se cognent sans fin aux parois de l’absurde.
Pour le réalisateur : « Ce sont ces centres de rétention administrative qui sont illégaux dans nos pays, censés respecter les Droits de l’Homme. La grande majorité des sans-papiers détenus dans ces centres ont dû fuir la misère, la dictature, la guerre, etc. Et lorsqu’ils arrivent chez nous, après un voyage souvent éprouvant et dangereux, on les accueille en les mettant en prison. On les traite comme des criminels. »
Interprété avec une belle énergie par l’actrice Anne Coesens, le personnage de Tania permet au spectateur de toucher la souffrance de ces parcours qui font rarement la Une des médias. Si le film se termine par une note d’espérance, il évoque aussi le parcours le parcours tragique d’une autre jeune femme, victime de la violence des reconduites aux frontières. Dénonciation puissante d’un problème de société qu’aucun citoyen ne peut ignorer et qui pose la question fondamentale de la démocratie dans le monde occidental.
Magali Van Reeth
Signis