d’Alain Cavalier
Sélection officielle Festival de Cannes 2011.
France, 1h45, 2011.
Sortie en France le 22 juin 2011.
avec Vincent Lindon, Alain Cavalier.
Un réalisateur et un comédien s’amusent à être le président de la république et son premier ministre. Un film hors norme et attachant où la liberté de ton reste élégante et les images émouvantes.
Incroyable ! C’est le premier mot qui vient à l’esprit du spectateur en entrant de ce film si particulier. Alain Cavalier est un cinéaste confirmé : Thérèse (1986), Libera me (1993) ont été primé dans de nombreux festivals et ont trouvé un public. Depuis plusieurs années, Alain Cavalier explore avec enthousiasme les possibilités techniques des caméras, toujours plus légères et performantes et fait des films plus intimistes : Le Filmeur (2005), Irène (2009). Films sans acteur et à la limite de l’autobiographie : le talent du réalisateur permettant d’échapper au nombrilisme. Vincent Lindon est un acteur populaire en France, qui choisit avec soin les films dans lesquels il tourne, évitant les grosses comédies poisseuses. Ses participations dans Fred de Michel Jolivet, Chaos de Coline Serreau, Mademoiselle Chambon de Stéphane Brizé ou Welcome de Philippe Lioret ont fait de lui un personnage respecté.
Deux personnalités attachantes qui se sont trouvées pour « jouer », c’est leur métier ! mais jouer vraiment, comme des enfants jouent aux cowboys et aux indiens. Ici, Alain Cavalier fait le président et Vincent Lindon son premier ministre. Ils s’habillent comme les gouvernants, choisissant avec soin le tissu des chemises et la couleur de la cravate, conscients que si l’habit ne fait pas le moine, il aide largement à endosser un rôle
Sans cesse, les protagonistes du film traversent la frontière entre fiction et réalité. On ne sait pas toujours si les colères de Lindon sont réalité ou exercice. Il garde tout au long du film un petit air de désarroi qui va bien à un homme politique ligoté devant les charges du pouvoir, mais aussi à un acteur face à un metteur en scène qu’il admire et dont il ne comprend pas le cheminement. Alain Cavalier est séduisant en homme qui soigne son apparence, en président aussi affable qu’autoritaire, en père de famille face à un fils qui lui survivra un jour.
Pater étant le titre du film, on ne peut évacuer les rapports père/fils qu’on entrevoit hors champs. Relation librement consentie entre un réalisateur, qui ne voulait plus tourner avec des acteurs, et un acteur qui admire avec tendresse, et une pointe de jalousie, cet homme libéré des contraintes professionnelles grâce à la technique. Libéré aussi de quelques angoisses existentielles, notamment à l’aide de la religion, qui lui fait envisager la mort comme une libération des lourdeurs de la vie.
Cette liberté de ton, si séduisante, est accompagnée d’un soin apporté aux images. Les plans, même lorsqu’ils montrent des objets, des gestes et des situations ordinaires, sont touchants, jolis et lumineux. Ils évoquent le cinéma, la vie, l’affection et la douleur. Une utopie se construit sous nos yeux, utopie d’artistes et d’hommes de leur temps.
Magali Van Reeth
Signis