de Juan Andrés Arango
Colombie/France/Brésil, 2012, 1h30.
Festival de Cannes 2012, sélection Un Certain Regard
Sortie en France le 17 avril 2013.
avec Luis Carlos Guevara, James Solis, Andrés Murillo.
Enfant des rues en Colombie, Tomà¡s essaye malgré tout de s’en sortir. Un film sensible pour dire une terrible réalité et un monde en mutation.
On peut tout de suite lever l’ambiguïté du titre espagnol : de cette plage là , on ne verra jamais la mer. La Playa DC est un quartier pauvre de Bogota, en Colombie et les touristes n’y viennent pas. Tomà¡s est un bel adolescent, un peu raide dans son corps, en perdition dans ses journées. Peu à peu, comme dans les contes de fées européens d’un autre âge, on comprend que son beau-père l’a mis à la porte de la maison familiale.
Son errance dans le quartier pour trouver un logement, un repas, un moyen de s’en sortir, est ponctuée de rencontres et c’est tout un autre univers qui vient à nous. Avec un infini respect pour les protagonistes mais sans masquer la souffrance quotidienne de Tomà¡s et de ses frères, La Playa raconte un quotidien terrible. Pauvreté, drogue, abandon, une jeunesse innocente est sacrifiée dans l’indifférence la plus totale. Tous ceux qu’on croise ont aussi leur survie à assurer dans cette grande misère collective.
Mais à travers l’histoire de Tomà¡s et de ses frères, c’est le portrait d’une ville en mutation. Depuis quelques années, la population afro-colombienne, chassée de leur campagne par la guerre civile, afflue massivement vers les grandes villes. Ces descendants d’esclaves se heurtent à la crise économique et à l’hostilité des populations blanches. Sans renier sa couleur noire, ni sa famille proche, Tomà¡s va trouver un « presque travail » et un semblant d’avenir.
Premier long métrage de Juan Andrés Arango, La Playa est un très beau film, aux images soignées. La gamme chromatique, mêlant les tons bleu et noir, donne une atmosphère à la fois douce et amère à cette histoire. Les trois acteurs qui interprètent les trois frères, à la fois très différents mais unis par la même détresse, sont justes et très à l’aise dans leur rôle. Notamment Luis Carlos Guevara qui sait donner au personnage de Tomà¡s une grande détermination sous une apparente timidité. Enfin, en tant que spectateur, on est sensible au léger rayon d’espoir qui apparaît à la fin du film.