de Marie-Noëlle Gougeon
de Céline Sciamma (2014 1H52).
Avec Karidja Touré, Assa Sylla, Lindsay Karamoh, Marietou Touré.
Pas facile d’être une fille quand on habite dans les cités des banlieues. Des films avaient déjà montré la réalité complexe des jeunes « beurettes », prises entre leur vie au collège intégrative et celle plus restrictive de la cité placée parfois sous la « coupe » du grand frère
On retrouve dans « Bande de filles » ces difficultés mais accentuées encore car les jeunes filles du film appartiennent à la communauté noire : celle venue du Zaïre, du Sénégal, du Nigéria etc..
Comment alors trouver son identité ? Marieme, l’héroïne du film, se voit refuser d’aller en seconde générale, elle s’occupe de ses jeunes sœurs et est souvent corrigée par un grand frère accro aux jeux vidéo. Leur mère fait des ménages tard le soir, tôt le matin.
Alors seul havre de paix et d’affection, la bande justement : celle d’autres filles comme elle, qui cherchent à se construire avec une énergie féroce une vie à la mesure de leurs désirs.
Mais à quoi s’identifier dans ces cités où c’est la loi du plus fort qui prime ? Les jeunes filles sont coincées entre des barres d’immeubles trop hautes, des coursives peu sûres, les bandes de garçons qui leur imposent leur façon de vivre. Et c’est justement vers tous ces codes du monde masculin qu’elles vont se tourner pour s’affirmer : le foot, les joggings et les sweats à capuches (jusqu’à se bander les seins pour ne pas monter leur féminité).
Il faut cogner pour montrer sa supériorité croient-elles, affronter la chef d’une autre bande de filles pour asseoir son territoire, dealer pour se faire accepter, changer de prénom pour faire croire qu’on sera mieux acceptée, se teindre en blonde pour intégrer le monde des « blancs »..C’est à une course sans espoir que ces filles sont contraintes.
Les seules échappées sont celles où les jeunes filles loin de la cité, s’expriment, chantent à tue-tête, comme sous la Grande Arche de la Défense, leurs longues jambes moulées dans des shorts rutilants. La plus belle séquence du film.
Après avoir quitté sa famille et essayé toutes les solutions possibles pour sortir de ses difficultés, Mairieme, tente de revenir chez elle. Devant la porte de son immeuble, elle hésite. On laisse le spectateur choisir la fin de l’histoire.
Bande de filles est un film physique, où l’énergie et l’envie d’exister de ces jeunes ados crèvent l’écran : elles parlent fort, s’apostrophent avec violence et humour. Le lien qui les unit est à la fois solide et si fragile. Les jeunes filles, toutes actrices non professionnelles, jouent quasiment leur propre rôle et sont épatantes…
Pas sûr pourtant que Bande de filles plaise à tous et en particulier aux filles de ces cités.
Et pourtant il se dégage de ce film une vitalité si grande qu’il nous prend au collet dès la première séquence, (un match de foot américain joué par les filles !) qu’il ne nous lâche plus, nous obligeant à regarder cette réalité des filles blacks de nos cités, faite de bleus à l’âme et au corps…. Une sacrée interrogation.