A la vie

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Semaine du 26 Novembre au 3 décembre

«A la Vie » de Jean-Claude Zilbermann avec Julie Depardieu, Suzanne Clément, Johanna ter Steege.
( 2014 1h44).

Jean-Claude Zilbermann avait déjà  réalisé un documentaire « Irène et ses sœurs » autour de la vie de sa mère, déportée à  Auschwitz qui avait retrouvé deux amies rescapées comme elle.

Chaque année depuis 1962 et jusqu’à  la fin de leur vie, elles se sont retrouvées à  Berck-Plage, quelques jours par an, aux vacances d’été.
C’est de cette « réalité » et des souvenirs que les jeunes femmes se remémoraient que JC Zilbermann a bâti cette fiction A la vie.
On est dans les années 60 au soleil de la mer du Nord. Les femmes osent les premiers maillots deux- pièces, la musique yé-yé commence à  envahir les ondes, sur la plage de gentils moniteurs accueillent les enfants au Club Mickey.

C’est dans cette ambiance rose bonbon et légère que Lili, Rose et Irène, plus ou moins bien mariées prennent quelques jours de liberté. Mais bien vite les souvenirs de la guerre brouillent leur apparente
complicité. Les unes veulent l’oublier, la troisième semble encore vivre enfermée, et que dire de la culpabilité qui les habite d’être encore en vie : pourquoi ont-elles survécu, elles, alors que plusieurs de leurs compagnes n’ont pas survécu dans cette Marche de la mort après la libération des camps ?

Les reproches et les disputes fusent.
Des regrets, des remords, la culpabilité d’être encore en vie alors que l’une d’entre elles y a perdu son enfant, qu’une autre n’a jamais voulu se marier pour ne plus jamais être enfermée et que Julie Depardieu-Irène, qui joue la mère du réalisateur subit une frustration matrimoniale et sexuelle depuis son mariage avec un ancien des camps victime d’une castration

Cette partie de leur vie est à  tout jamais en elles. Qu’elle la taise comme Rose, l’oublie comme Lili ou en parle comme Irène, elles ne peuvent se défaire d’y penser, de l’évoquer.

Mais rien de morbide dans leur propos et encore moins dans la façon dont JC Zilbermann a réalisé son film : le choix du temps des vacances, des retrouvailles entre amies, la musique de l’époque, colorent ces souvenirs d’un ton doux amer. Ces femmes se libèrent d’un poids trop lourd en goûtant ces petites choses de la vie : la mer, le sable, les glaces menthe à  l’eau. Sourire pour ne pas sombrer. S’octroyer quelques moments de liberté avec le jeune moniteur car on sait bien que la réalité reviendra bien vite.

Des trois actrices on retiendra surtout Julie Depardieu qui illumine le film de ses retenues, de ses sourires candides et ce chagrin que l’on sent toujours derrière les yeux bleus étonnés.
A la vie, à  la mort : un film grave et léger à  la fois.
L’une ne va jamais sans l’autre quand on a vécu l’enfer des camps

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