Le scandale Paradjanov ou la vie tumultueuse d’un artiste soviétique
de Serge Avédikian et Olena Fetisova
avec Serge Avedikian.
(France Géorgien Ukrainien 1H35).
Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon
Serguei Pardjanov est un cinéaste qui fut honoré par l’Occident mais critiqué voire combattu par le pouvoir soviétique puisque l’Ukraine, son pays appartenait alors à l’URSS. C’était un être hors norme, qui aimait la démesure, faisait exploser les codes classiques du cinéma, bousculait les règles de l’art et des convenances mais aussi faisait montre d’une créativité à la fois poétique, jubilatoire et iconoclaste. C’était dans les années 50-60
Auteur du célèbre film « Les chevaux de feux » et de « Sayat Nova », il fut emprisonné dans un camp pendant cinq ans pour propos subversifs et homosexualité.
Le film de Serge Avédikian « Le scandale Paradjanov ou la vie tumultueuse d’un artiste soviétique » retrace une partie de sa vie dans lequel le réalisateur joue également le rôle de l’artiste. Serge Avédikian livre un film plein d’empathie pour son sujet : les démêlés de ce peintre avec l’Etat soviétique, la censure mais aussi son amour de la vie qui bouscule tout, sa créativité, sa liberté qu’il paiera au prix fort. On sent Paradjanov attaché à ses origines, son pays. Il avait tourné Sayat Nova dans un dialecte régional ukrainien. Et le gouvernement soviétique l’avait accusé de nationalisme !
La fin du film le montre lors de sa venue à Paris où après les discours et les distinctions, il se repose près de la fontaine de Nicky de Saint-Phalle au milieu des statues des femmes obèses et multicolores, des jets d’eau tourbillonnants.
« Les dessins, les images, les films ont plus de force que les mots pour renverser les dictateurs de touts poils » disait-il en substance
Le scandale Paradjanov est un film truculent, aux couleurs chatoyantes, à la musique entraînante. Pas complètement maîtrisé mais attachant même dans ses défauts : une profusion de personnages, une mise en perspective parfois un peu relâchée, des idées qui « explosent » un peu dans tous les sens mais une belle illustration de la défense de l’art, des artistes et de la créativité.
En cette semaine où la liberté d’expression de caricaturistes fut si lourdement assassinée, on est d’autant plus heureux de voir un film défendre cette liberté des artistes, qu’elle s’exprime en France, en Ukraine ou partout dans le monde. Elle y apparaît force de vie.