Chronique cinéma – Le dernier jour d’Yitzhak Rabin

de Amos Gitaï
Docu-fiction Israëlien-français
avec Ishac Hiskiya Pini Mitelman. (2015). 2h40.

Vingt ans après l’assassinat d’Yitzhak Rabin par un juif extrémiste, le cinéaste Amos Gitaï revient sur cet événement traumatisant qui montre à  quel point les extrémismes politiques et religieux se rejoignent là -bas comme ici, hier comme aujourd’hui

Il y a vingt ans le 4 novembre 1995, Yitzhak Rabin, 1er ministre israélien, l’homme des accords d’Oslo et Prix Nobel de la paix, était assassiné sur la place des Rois d’Israël à  Tel Aviv après un long discours contre la violence et pour la paix. Son assassin : un étudiant juif religieux d’extrême droite.
Le cinéaste israélien Amos Gitaï a choisi de revenir sur cet évènement choc pour le pays et le monde en s’appuyant sur le contenu des travaux de la commission Shamgar. Celle-ci avait eu pour mission d’enquêter sur les failles du dispositif de surveillance du 1er ministre.

Aujourd’hui, la gauche israélienne n’a pas trouvé de nouveau leader, Israël n’a toujours pas tourné la page, et entretient une certaine culpabilité par rapport à  cet assassinat. C’est pour tenter de sortir de ces non-dits qu’Amos Gitaï a décidé de tourner ce documentaire.

Le réalisateur alterne des images d’archives de cette soirée du 4 Novembre avec des scènes rejouées à  partir du contenu des rapports de cette commission. On voit côte à  côte Shimon Pérès et Yitzhak Rabin devant des milliers de manifestants pour la paix et c’est très émouvant.

Amos Gitaï choisit aussi de montrer des images des semaines précédentes nous rappelant à  quel point le 1er ministre était la cible d’attaques verbales violentes, d’accusations graves. Représenté sous l’uniforme nazi, comparé à  un membre de la Gestapo, à  Pétain, Yitzhak Rabin est « condamné à  mort » par un rabbin car voulant donner la Terre d’Israël à  des « goys » !
A la Knesset, le 1er ministre est souvent empêché de parler. Dans les rues, les partisans du Likoud (dont Benjamin Netanyahou) scandent des condamnations et des mises à  mort sur des pancartes brandies par une foule chauffée à  blanc. On est en plein dans les accords d’Oslo, Israël a décidé de se retirer de la bande de Gaza mais Rabin prévoit déjà  les difficultés du processus si ce retrait ne s’accompagne pas de mesures aidant les Palestiniens.

Ce film choc, long, trop long (2h40) a le mérite pourtant de nous rafraîchir la mémoire et de resituer cet assassinat dans le climat de l’époque. Rabin avait été le héros de la Guerre des six jours mais s’était changé en « colombe » et souhaitait qu’Israël accepte de reconnaître la réalité palestinienne.
C’en était trop pour les « faucons » et les extrémistes religieux. Et c’est le fait le plus choquant de voir la justification de ce geste mortel dans des extraits de la Thorah cités et instrumentalisés par des rabbins : Celui qui donne la terre d’Israël à  un étranger est un traître et doit mourirEt une sentence ressemblant à  la fatwa musulmane est ainsi prononcée.
Il y a 20 ans comme aujourd’hui, lorsque l’extrémisme religieux (qu’il soit juif, chrétien ou musulman) nourrit l’extrémisme politique il aboutit à  la haine de l’autre même s’il est de son propre pays et 1er ministre de surcroît.

http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19558657&cfilm=239860.html

Pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés