L’un des grands compositeurs de notre temps, Krzysztof PENDERECKI, est mort le 29 mars 2020.
Krzysztof PENDERECKI – 1933-2020
Titulaire de nombreux prix, docteur honoris causa de plusieurs universités, Krzysztof PENDERECKI était le plus grand compositeur polonais vivant, auteur de plus de 100 oeuvres. Catholique, Krzysztof PENDERECKI était un être profondément religieux, en même temps qu’il était aussi un compositeur doté d’une conscience sociale très marquée qui se préoccupait des problèmes généraux de l’humanité, en particulier celui de l’intolérance et du pouvoir du mal qu’il avait traité dans trois opéras: Les Diables de Loudun, Le Masque noir et Ubu Rex.
Depuis longtemps, la conviction religieuse et l’engagement social, s’exprimaient d’une manière de plus en plus vivante dans les compositions pour choeur et orchestre de PENDERECKI. Dans ses oeuvres, il a plusieurs fois utilisé la langue latine, médium de tous les temps et universellement comprise. Selon lui en effet, « il n’est vraiment rien qui ne dise plus, qui ne signifie autant ». Parmi ses oeuvres basées sur le latin qui se réfèrent essentiellement ou exclusivement à des thèmes religieux, il faut citer un Stabat Mater (1963), la Passion selon Saint Luc (1966), Utrenia (1970), dont l’inspiration est la mise au tombeau du Christ, ainsi qu’un très beau Magnificat (1974). Pour d’autres de ses oeuvres, comme le Rêve de Jacob (1974), Krzysztof PENDERECKI a utilisé la langue allemande. Il a écrit aussi un Te Deum et le Requiem polonais, toutes pièces écrites dans la perspective de la foi en Dieu, du sens de la vie et de l’ordre de l’univers.
Parmi ses oeuvres religieuses, il faut citer particulièrement sa Passion selon Saint Luc que j’ai eu le plaisir d’entendre il y a bien longtemps à l’Opéra de Lyon, où Krzysztof PENDERECKI lui-même était venu la diriger avec l’extraordinaire soprano Stefania WOYTOWICZ. Cette oeuvre est une profession de foi d’une expérience mystique chrétienne exceptionnelle au sein d’un monde sans Dieu. Ce n’est pas une oeuvre facile. Et pourtant, Krzysztof PENDERECKI parle résolument de et à l’homme de notre temps. Le souvenir d’Auschwitz met l’auditeur sur la voie. Les bourreaux du Christ sont des tortionnaires SS et des masses fanatisées; les victimes torturées par la terreur et le Christ sont identiques jusque dans les lamentations, les accusations presque muettes, dans la plus vive douleur et dans le désespoir. Ce n’est que faiblement, mais avec d’autant plus d’authenticité, que cette identité transparaît également dans l’attente de la miséricorde du Père et de la victoire de la Vie.
Par sa fidélité à la voix, par son engagement religieux, social et politique, l’oeuvre de Krzysztof PENDERECKI tient une place originale dans la musique de notre temps. La musique vocale est, chez lui, le terrain privilégié des combats idéologiques autant que de la recherche sonore.
Pierre Moutarde.
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Agnus Dei
Choeur National des Jeunes de France.
Direction: Régine Théodoresco.
Enregistrement du 27 mai 2013
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