de Leos Carax
Allemagne/France, 2012, 1h55
Festival de Cannes 2011, sélection officielle, en compétition.
Sortie en France le 4 juillet 2012.
avec Denis Lavant, Edith Scob, Eva Mendes.
Réflexion brillante sur le cinéma et l’art de la mise en scène de notre propre vie, le nouveau film de Leos Carax peut aussi irriter par son manque d’humilité.
La vie est un spectacle dont nous sommes à la fois l’acteur principal et le spectateur assidu Embarqué dans une luxueuse voiture, le personnage principal de ce film, monsieur Oscar, est tous les personnages. C’est son métier. il fait ce pour quoi on l’engage : le mendiant, l’amant, le criminel ou le père inquiet. La voiture, comme les cinéastes iraniens l’ont souvent montré, est le dernier refuge de l’intime dans les sociétés trop policées ou trop médiatisées. Ici, la limousine blanche évoque à la fois le cercueil, le luxe factice et le vaisseau spatial, un peu hors du temps mais insonorisé aux bruits et aux sollicitations de l’extérieur. Elle est un habitacle protecteur, la loge de l’acteur en déplacement, le lieu du premier miroir. Elle sert au démaquillage, au costume, à la préparation du prochain rôle, au repos.
Holy Motors nous embarque pour un voyage dans le cinéma et dans l’art de représentation. Denis Lavant, présent dans chaque plan, est tous les rôles avec une confondante facilité. Il est crédible en femme, en beau gosse, en gentil comme en méchant. La vraie force du film, c’est lui, un numéro d’acteur de bout en bout sans qu’on se lasse une minute ! A ses côtés, la présence discrète, élégante, presque envoûtante d’Edith Scob. Couple inhabituel au cinéma, elle grande et élégante, lui, petit bonhomme au visage mâché, duo lisse, harmonieux, en dehors de tout désir sexuel, de toute passion.
A travers la succession de saynètes qui questionne la frontière ténue entre réalité et représentation, c’est aussi un hommage au cinéma qui se dessine. Puisqu’on se met en scène comme le cinéma se met en scène, les références sont nombreuses, à d’autres grands films, aux autres films de Leos Carax. S’amusant avec nos références cinématographiques, il joue avec nos attentes. C’est amusant mais un peu vain. Et c’est sans doute un peu irritant parce qu’on se dit vite, d’une part, que le réalisateur manque totalement d’humilité mais surtout, qu’il manque d’idées. Comme s’il n’osait pas se lancer dans quelque chose de tout à fait neuf, dans une création qui ne soit pas une re-création ou récréation
Heureusement, la dernière scène, pleine d’humour et d’auto-dérision, nous permet de terminer sur une note moins sombre quant à la capacité créatrice de Leos Carax.