Arrêtez-moi

de Jean-Paul Lilienfeld

France/Belgique/Luxembourg, 2012, 1h37

Sortie en France le 6 février 2013.

avec Sophie Marceau, Miou Miou et Marc Barbé.

Une femme s’accuse du meurtre de son mari face à  un officier de police qui ne veut pas l’entendre. Une étrange confession qui nous amène au cœur de la complexité des violences conjugales.

C’est une longue nuit dans un commissariat de police mais est-ce pour autant un film policier ? Pour avoir vu beaucoup d’interrogatoires au cinéma, on comprend très vite que les codes du genre vont déraper. D’abord parce qu’il n’y que des femmes et ensuite parce que l’enquête est close. Le lieutenant Pontoise est de garde dans une petite ville portuaire et elle tient les ennuis à  distance en éteignant la lumière de son bureau. Arrive pourtant une autre femme, déterminée à  régler une vieille histoire. L’une s’accuse du meurtre de son mari, l’autre ne veut pas l’entendre et encore moins enregistrer cette plainte. Au cœur de leur affrontement, la violence conjugale et les sentiments, très complexes, qui en découlent.ARRETEZ-MOI_5_c_Ricardo_Vaz_Palma.jpg

Le réalisateur Jean-Paul Lilienfeld s’est inspiré du roman de Jean Teulé, Les Lois de la gravité. Il en fait un film très personnel qui donne un angle original à  ce sujet délicat. Comment parler des femmes battues en évitant le voyeurisme ? Un surcroît de violences inutiles ? Arrêtez-moi trouve un juste équilibre, alternant les scènes de souvenirs – heurtées, déchiquetées, tremblées, comme leurs victimes, avec les scènes du commissariat où la tension et l’image sont différentes. Au cœur du film, les vraies raisons qui poussent chacune des deux femmes dans leurs convictions.ARRETEZ-MOI_7_c_Ricardo_Vaz_Palma.jpg

De quoi s’accuse la femme coupable ? Veut-elle se débarrasser d’une étrange culpabilité ? « Je suis coupable parce que j’ai été victime » crie la femme à  plusieurs reprises. Au fil de la nuit, on se rend compte, avec le lieutenant Pontoise, que cette déclaration tardive s’adresse à  son fils, pour lui montrer qu’il est possible d’arrêter le cercle vicieux de la violence, d’agir en dénonçant officiellement ce qui est arrivé.ARRETEZ-MOI_2_c_Jean-Paul_Lilienfeld.jpg

Une troisième figure féminine arrive plus tard, sous la forme d’une vierge en plastique bleue. Entre fiole à  potion magique et station météo, elle donne l’occasion d’une scène qu’on ne pensait pas voir un jour dans le cinéma français : Sophie Marceau et Miou-Miou récitant ensemble un « Je vous salue Marie » Deux actrices magnifiques, incarnant deux femmes égarées cherchant un secours, un soutien, un miracle. Sophie Marceau est méconnaissable, endossant le personnage de cette femme simple, mal habillée, mal coiffée, battue, humiliée, cherchant les mots pour dire une souffrance qu’elle ne sait pas exprimer. Beaucoup d’autres actrices célèbres ont essayé de jouer des femmes aussi anonymes, cassées et mal fagotées, peu y ont réussi aussi bien qu’elle. Miou-Miou donne au lieutenant Pontoise ce grain de folie lasse qui fait le charme du personnage.

Magali Van Reeth

Signis

Pour marque-pages : Permaliens.

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