Qui a donc parlé du « foyer » d’un théâtre pour désigner à la fois la flamme et la familiarité ?
L’argument de l’Ecole des Femmes est trop connu pour y insister. C’est une pièce de la maturité (1662). Molière vient d’épouser Armandequi pourrait être sa fille, et comme plus tard pour le « Malade Imaginaire », que va jouer un Molière malade, on peut se demander si il n’y a pas là une tentative d’exorcisme d’un mariage à risque
La grande force de cette « comédie grinçante » est d’associer le ton de la farce où Molière est passé maître avec la souffrance d’un homme qui découvre à ses dépens que l’amour ne peut-être obligé, et que sa vraie nature échappe à toute contrainte, et peut aussi bien s’expérimenter par le coup de foudre que par la perte. L’amour est « ingénu », énigmatique, comme la dernière image d’Agnès, et ce mystérieux attachement ne reconnait ni l’école préparatoire de la société, ni l’argent (comme Dandin en fera la douloureuse expérience). Il peut y avoir mariage forcé, il n’y a pas d’amour forcé.
La mise en scène a su garder l’esprit de la farce avec ses quiproquos, sa gestuelle « commedia dell’arte » et ses clins d’œil très réussis au public, servis par une intrigue caricaturale, en même temps que l’on sent de façon très subtile évoluer de façon opposée le drame d’Arnolphe et l’amour d’Agnès dans toute sa naïveté touchante.
Le décor est minimaliste très efficace en lien avec les « tréteaux » du théâtre populaire et un rappel par le jardin central et les lanternes de celui que Christian Bérard fit pour Jouvet auquel on a souvent pensé ce soir.
Il y a dans l’histoire du théâtre une histoire des mises en scène, et celle là devrait compter dans cette histoire où tant de grandes figures du théâtre se sont illustrées .Pièce de la maturité. A voir absolument.
Hugues Rousset