au TNP
de Heinrich von Kleist
mise en scène Giorgio Barberio Corsetti
Du 25 février au 8 mars 2015
Grand théâtre – Salle Roger Planchon
Les représentations restantes
Samedi 28 février 2015 à 20 h 00
Mardi 3 mars 2015 à 20 h 00
Juste retour des choses, «Le Prince de Hambourg » revient au TNP.On se souvient de son apparition magique en 1951, sous la conduite de Jean Vilar, avec les traits de Gérard Philipe, au festival d’Avignon et Jeanne Moreau dans le rôle de Nathalie. Olivier Py, pour la première année de sa direction du festival a choisi, pour l’inaugurer cette pièce de Von Kleist, et un metteur en scène italien : Giorgio Barberio Corsetti. Le désir d’être dans la tradition du Répertoire n’est probablement pas étranger à ce choix.
L’intrigue est simple et s’ouvre sur «Le Prince de Hambourg » qui sort difficilement d’un rêve, à la veille du départ en guerre du duché de Brandebourg, contre la Suède, sous le commandement du Grand Electeur, son oncle. Il est distrait lorsque lui sont données les instructions de ne pas faire intervenir la cavalerie qu’il commande, avant l’ordre du chef de guerre. Il ne respectera pas les consignes et devancera le signal, permettant ainsi une brillante victoire qui en fait un héros, mais il sera condamné à mort pour désobéissance. L’amour de Nathalie, dont le gant perdu et retrouvé, a prolongé son rêve et la pétition de ses soldats feront-elles changer la décision, et comment réagira le Prince ?
Xavier Gallais campe remarquablement avec beaucoup de cohérence l’image d’une nonchalance chanceuse, soumise à son destin entre rêve et réalité, avec la conviction romantique que l’on peut toujours se soustraire au monde, dont nous sommes les marionnettes par le rêve initial ou l’évanouissement final. Là où Gérard Philippe était Fanfan la Tulipe, maté de Don Quichotte, Xavier Gallais appartient au monde de Calderon, où Sigismond participe à deux univers que sépare le miroir de Lewis Carroll. Faut-il y voir une leçon de vie ou de mort ? Il est le cousin d’Hamlet : « dormir, mourir, rêver peut-être ». Kleist se suicidera peu de temps après cette dernière pièce, sans qu’il y ait là une réponse.
En contraste du personnage principal, les acteurs du réel, ceux qui font la guerre « aux ordres » sont très convaincants et bien dirigés, avec une Nathalie d’Orange qui fait figure de passeuse entre deux mondes. Rêve et réalité sont repris dans l’espace avec l’espace de guerre, horizontal puis en pente douce, où le héros ne pourra que glisser et le petit théâtre de l’imaginaire où se retire le réel, comme l’Electrice et sa cour, le gant perdu comme trace abandonné au songe.
Quelques très belles images esthétiquement très fortes : au départ les éphèbes nus habillant le héros, la chevauchée fantastique en projection vidéo, et l’image finale de marionnette, symboles plus en écho de Kleist que de la pièce.
«Le Prince de Hambourg », un drame ? S’interroge au cours du prologue l’Electrice, en tout cas une très belle réalisation dont la retransmission en direct en juillet du festival avait bien montré que le théâtre, au théâtre, ne peut être téléporté, quelque chose qui participe de la présence réelle !
Il faut donc aller au TNP.
Hugues Rousset
[-> http://www.tnp-villeurbanne.com/manifestation/prince-hombourg-fev-mars-14-15#/videos]