Un film de Sebastian Schipper – Allemagne – 2019 – 1 h 39.
Ils ont tous les deux 18 ans. Ou presque… Gyllen est britannique. William est congolais. Leur rencontre se situe au Maroc, au moment où Gyllen a abandonné sa famille (sa mère et son beau-père), avec laquelle il était en vacances, et a pris le large avec la voiture familiale. William, quant à lui, a rejoint le Maroc depuis son pays, le Congo, avec l’espoir de gagner la France où se trouve déjà son frère Baptiste. Rapidement, les deux garçons décident de lier leurs sorts, et d’entreprendre le voyage en direction du Nord, jusqu’à Calais. On apprend rapidement que Gyllen souhaite rencontrer son père installé dans le Sud-Ouest de la France.
Adoptant le style du road-movie, le film raconte le périple qu’entreprennent William et Gyllen, périple émaillé d’incidents et de rencontres parfois heureuses, souvent franchement inquiétantes.
Au travers du personnage de William, c’est le thème de l’immigration, africaine en particulier, que le réalisateur met en avant, rappelant l’ambition le plus souvent irraisonnée, mais chevillée au corps, de la part de nombreux migrants, de rejoindre la Grande-Bretagne vue comme un mythique Eldorado.
Gyllen n’exprime évidemment pas de telles ambitions. Il apparait vite comme un garçon très tourmenté, très marqué par des relations familiales tumultueuses, auprès d’une mère qu’il rejette manifestement, et à la recherche d’un père perdu de vue depuis longtemps. Père avec lequel il sera incapable de renouer lorsqu’il se trouvera face à lui.
Ces deux sujets, l’immigration, la famille, balaient le récit sans se faire de l’ombre. Ils sont traités avec finesse et sans manichéisme, ce qui leur donne beaucoup de réalisme et de vérité.
La fin du film est tout particulièrement réussie, empruntant un ton presque documentaire, une fois que Gyllen et William se retrouvent à Calais, au milieu de la foule des migrants africains, et des bénévoles des associations qui tentent, non sans difficultés, de leur venir en aide. Tout cela sous le regard permanent des nombreux policiers.
Amitié, solidarité, résilience, illuminent la route des deux garçons, toujours suffisamment forts pour surmonter les obstacles qui se dressent devant eux.
En 2015, le réalisateur, Sebastian Schipper, nous avait littéralement emballés avec Victoria, son précédent film, tourné en un seul plan-séquence de plus de deux heures !
Avec Roads, il revient à un style plus classique, avec une narration très enlevée, une belle esthétique, en particulier en ce qui concerne la lumière et les couleurs des scènes de nuit. Le seul point faible du film réside, pour moi, dans la musique, banale et souvent tonitruante.
Magnifique interprétation de Stéphane Bak (William), et de Fionn Whitehead (Gyllen), qui donnent beaucoup de chair et d’os à leurs deux personnages.
Un beau film, qui de belles choses, et qui les dit bien.
Pierre Quelin.
=o=o=o=
Sebastian Schipper, Fionn Whitehead, Stéphane Bak.
=o=o=o=
Cliquer sur les images pour les agrandir.