EXPOSITION Alfred Manessier

UNE INVITATION à  vous rendre au MUSÉE d’ART RELIGIEUX de FOURVIERE, pour voir l’exposition de deux séries de Lithographies d’Alfred Manessier,(1948,1978) inspirées par la fête de Pâques :

QUELQUES NOTES SUR ALFRED MANESSIER, Pà‚QUES, ET LA LUMIÈRE.

Alfred Manessier (1911-1993) s’inscrit dans l’histoire de la peinture par son appartenance à  l’ « Envolée Lyrique » des années 50, qui caractérise la peinture non-figurative, informelle, abstraction « chaude », qui caractérise le mouvement auquel il appartient avec à  l’Ecole de Bissière, d’autres grands peintres : Le Moal, Bazaine, Ubac, Estéve A la rigueur de l’abstraction géométrique (abstraction « froide ») portée par exemple par Piet Mondrian, il exprime son « être au monde », dont il tente de saisir le surgissement informel, non pas pour le maitriser, (comme les cubistes par exemple), pour le reproduire (peinture figurative), mais pour, dans un va et vient entre extérieur et intérieur, en saisir les correspondances intimes, les rythmes et la musique, comme le compositeur avec des notes ou le poète avec des mots.

Le jeu des couleurs traversées par la Lumière, qui émerge du noir qui en surplomb de ses compositions, exprime ainsi l’Espérance, face à  un monde où d’autres (poètes, artistes plasticiens, philosophes), au lendemain de la guerre en sont restés à  l’expérience d’un univers dépourvu de sens, les assigne au néant et au choix de l’absurde et de la dérision.

La Passion du Christ et la Pâques permettent à  Manessier de retrouver les traces de ce chemin initiatique qui va des ténèbres à  la Lumière.

Cela n’est possible qu’après, le bonheur d’une enfance dans la Baie de Somme, (où il perçoit la circulation de la Lumière, qui conditionne l’ouverture au monde de l’Invisible que la peinture rendra Visible), une expérience fondatrice de la Foi à  la Trappe à  22ans, et un travail acharné tout au long de sa vie pour nourrir une palette exceptionnelle.

Et pour revenir à  Pâques et vous engager à  voir cette exposition :

1943, Soligny, avec Camille Bourniquel, à  la Trappe, il assiste de la tribune au Salve Regina, dans l’obscurité totale de la chapelle trouée par la lumière du Saint Sacrement. « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais pas trouvé »,

A mettre en résonance avec Pâques, passage des ténèbres à  la lumière, ce qu’exprime ce poème de SAINT JEAN DE LA CROIX, « La nuit obscure »

Ah, je sais la fontaine qui coule et bruit,

Encore que ce soit de nuit.

Son origine ne la sais, n’en a point,

Mais sais que d’elle toute origine vient,

Encore que ce soit de nuit.

Je sais qu’il ne peut être chose si belle

Et que les cieux et la terre boivent en elle,

Encore que ce soit de nuit.

Sa clarté au grand jamais n’est obscurcie,

Et sais d’elle toute lumière sortie,

Encore que ce soit de nuit.

Je sais tant abondants être ses courants,

Qu’enfers, cieux et peuples vont irriguant,

Encore que ce soit de nuit.

Bien sais qu’en elle on ne saurait trouver pied,

Et que nul ne pourrait la passer à  gué,

Encore que ce soit de nuit.

Or le courant qui naît de cette fontaine

Bien sais qu’il est aussi puissant qu’elle entraine

Encore que ce soit de nuit.

Là , elle appelle les créatures

Qui de cette eau s’abreuvent, encore qu’à  l’obscur,

Parce que c’est bien la nuit.

ENTRETIENS d’Alfred Manessier AVEC JEAN CLAY – 1962

Je commence à  peindre quand je ressens une coïncidence très étroite entre le spectacle que j’ai sous les yeux et mon état intérieur. J’oscille continuellement du monde intérieur au monde extérieur. Je dois m’épauler au réel, lire dans la lumière, les chants, les arbres, les pierres, cette Joie, cet amour qui m’habitent. Du même coup, le monde prend son sens. Puisqu’il y a harmonie entre l’interne et l’externe, c’est la preuve que des lois nous dépassent et nous englobent.

Je guette, j’attends à  l’affût comme un chasseur Je mets un peu de peinture ici ou bien là  je tâtonne, je cherche des coïncidences des rapports entre les formes et les couleurs et puis, brusquement quelque chose se lève devant moi je le sens très fort le dialogue s’est noué je n’ai plus qu’à  suivre c’est tellement rapide Alors la toile commence à  vivre On se parle je ne suis plus seul. Je suis dans ma vérité de peinture Parfois vous perdez la piste C’est cela, on commence à  souffrir. Cette liberté qu’on avait acquise, cette aisance, cette course en avant, çà  s’épuise. L’ouverture est devenue impasse. Vous êtes dans un piège. Angoisse : plusieurs fois dans ma vie, je me suis dit : c’est fini. Spirituellement, l’œuvre d’un artiste se développe sur toute une existence, comme une plante.

Je suis là , Je piétine, et puis, j’ai un choc, un paysage, des fleurs, une pierre que j’ai ramassé, et qui coïncide en moi avec quelque chose, et c’est reparti.

C’est chaque fois pareil, chaque toile est une mort et une résurrection.

Pâques, coïncide au printemps, avec la renaissance de la terre, un sentiment d’exaltation religieuse trouve sa correspondance dans le spectacle verdoyant de la nature qui s’éveille. Qui ressuscite. VOILA LE NŒUD DE MA PEINTURE.

Jusque sur la Croix, l’angoisse du Christ n’a pas cessé. La Nuit des Oliviers est une nuit d’angoisse. « Et sa sueur devint comme du sang qui tombait jusqu’à  terre »

Le christianisme a donné sens à  cette angoisse.
Je veux garder en moi une tension, car je veux exprimer à  la fois la frénésie de mon siècle et la lumière d’espérance dont je me sais porteur.

1949-1978 : C’est une symphonie que j’ai voulu écrire ici, la SYMPHONIE DE Pà‚QUES, avec la vie, la mort, la résurrection, la joie de Pâques.

ALLELUIAH, les derniers mots d’Abbeville.

Hugues Rousset

Exposition jusqu’au 14 juin.

(à  droite de la basilique) 8, place de Fourvière

Contact visite : 04 78 25 86 19

La Sapienza

de Eugène Green

avec Fabrizio Rongione, Christelle Prot, Arianna Nastro.

(Italien 2015 1h35).

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Un film au style très pictural et parlé, sur la découverte des beautés du baroque italien et de la
transmission de l’intime. Une invitation à  dépasser une certaine austérité pour accéder à  l’émotion

Alexandre, cinquante ans, est un brillant architecte français honoré par ses pairs. Depuis longtemps, il souhaiterait écrire un livre sur l’architecture baroque italienne. Et parmi les illustres bâtisseurs de la péninsule, un nom l’attire plus particulièrement : celui de Borromini architecte de la fameuse église San Ivo alla Sapienza à  Rome. La Sapienza , c’est la connaissance, la sagesse. Alexandre croit profondément à  la transmission du savoir, à  une tête bien pleine. En se rendant en Italie, sur les rives du Lac de Garde avec son épouse Alienor, psychologue, il fait la connaissance de Goffredo et de sa sœur Lavinia. Cette dernière semble souffrir d’hypersensibilité et doit souvent être alitée…

Et c’est un curieux chassé-croisé qui va se mettre en place, une double complicité entre ces deux « couples ». Car Goffredo est étudiant en architecture et Alexandre va voir éclore sous ses yeux un élève d’abord attentif, respectueux puis bien vite s’émancipant de l’enseignement de l’architecte pour à  son tour donner son point de vue, enrichir la connaissance du « maître ».

De la même manière, Lavinia va entraîner Alienor dans un travail d’introspection sur la vie qu’elle mène avec Alexandre, alors que c’est le cœur de son métier de psychanalyste, pour faire éveiller en elle et dans son couple des désirs encore cachés..

L’architecture religieuse est là  pour que l’homme s’élève vers l’invisible, le divinC’est à  ce cheminement spatial et intérieur que le couple de français est invité.

Alexandre découvrira grâce à  la rencontre avec ce frère et cette sœur que l’essentiel n’est pas de savoir, d’être un puits de sciences mais d’aimer, de donner.

Mieux, il découvrira une autre forme de paternité : en Goffredo il retrouvera peut-être un peu de ce fils que son épouse et lui ont perdu à  l’âge de 8 ans, lui apportant la perspective de transmettre son expérience..

Eugène Green, le réalisateur, a volontairement voulu une grande épure pour ce film. Chaque plan architectural est minutieusement construit. Les images et les couleurs italiennes sont superbes et le montage rend le film d’une lente beautéLe réalisateur a poussé ces effets de style jusque dans la direction d’acteurs qui s’expriment d’une façon très théâtrale, ce qui surprend au début Par exemple, toutes les liaisons entre les mots sont faites

Le film est exigeant, un peu aride, à  la fois pictural et plein d’intériorité. Il n’est pas facile de parler d’architecture au cinéma sans être un peu « professoral » En introduisant un couple de jeunes adultes, Eugène Greeen oblige Alexandre à  être bousculé et à  entendre les critiques et les remarques du jeune homme comme Aliénor est touchée par Lavinia. Sur les bords du Lac de Garde, la fin du film est lumineuse et libératrice pour tous les quatre.
Les « Vêpres de la Vierge » de Monteverdi ouvrent et clôturent le film, moment aérien et enchanteur, proche du ciel..

Les quatre comédiens malgré cette langue très parlée, rendent formidablement présents leurs personnages.
Une mention toute particulière à  la jeune Arianna Nastro, qu’on dirait sortie d’un tableau de Boticelli.

[->http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19550873&cfilm=230286.html]

Sur la route avant l’aube

Épilogue de l’Evangile de Luc

création scénique par le Théâtre de la Clairière (Besançon)

Texte et mise en scène Pierre Louis.

Avec : Lucas Vautrin, Roseline, Malaisé, Marc-Antoine Crionnet, Alix Baudoin, Benoît Chabod.

à  l’Espace culturel St-Marc – Salle «Ste-Hélène »

10, rue Ste-Hélène Lyon 2e

le jeudi 9 avril à  20h30

Une interprétation qui ne vise pas à  déjouer le mystère mais à  le laisser jouer pleinement, revivifiant du même coup l’exercice de théâtre…

« Cinq acteurs, dont un accordéoniste, jouent avec brio cette pièce aux références multiples et dont les éléments symboliques renforcent la portée universelle. Le résultat ? Etonnant ! »
Est Républicain, 01.08.14

Le Théâtre de la Clairière présente ce spectacle dans le cadre de son partenariat avec l’Espace culturel Saint-Marc qui a débuté en novembre 2013 avec deux représentations de L’Annonce faite à  Marie de Claudel.

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Réservations: contact@theatre-clairiere.fr tel : 06 60 63 47 91

prix : 12 € et 8 €

Cinéma et Spiritualité

Lyon – Paroisse du Sacré-Cœur

89 rue Antoine Charial 69003 Lyon

Tél. : +334 78 54 86 31

L’ association Cinéma et Spiritualité, présidée par Michèle Debidour, organise des rencontres mensuelles à  Lyon (paroisse du Sacré-Coeur) et Dieulefit (en partenariat avec le cinéma Labor).

En projet : formation à  l’analyse filmique et Journées Cinéma.

prochain rendez-vous à  Lyon : MARDI 7 AVRIL à  20h30

 «Crosswind » film estonien, prix du jury œcuménique à  Varsovie

 «Le dernier coup de marteau » film français dont l’acteur principal a été primé à  Venise.

+ d’info : [->mdebidour@gmail.com]

[->http://sacrecoeur-lyon.fr/_Paroisse-du-Sacre-Coeur-Lyon_]

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Blanca Li et ses robots !

A la Maison de la Danse : Blanca Li et ses robots !

Jusqu’à  samedi 21 mars, la chorégraphe Blanca Li nous convie à  une heure trente de plaisir en compagnie de ses robots et de ses machines, et de ses huit merveilleux danseurs.

Nous vivons avec des machines de toutes sortes : robots, ordinateurs, machines, le jour, la nuit, partout. Blanca Li a voulu explorer la relation complexe de l’homme à  la machine, construisant une chorégraphie décalée et surprenante. Ce beau spectacle, inventif et coloré, pose la question suivante : une machine, même évoluée, peut-elle remplacer le rapport au vivant ? Ces petits robots que l’on voit évoluer sur scène pourront-ils, un jour, exprimer des sentiments ? D’ores et déjà , ils gèrent notre quotidien, mais pourront-ils s’humaniser en prenant notre apparence ?

Autant de questions qui sont posées dans cette chorégraphie pour huit danseurs dont les mouvements déclenchent toute une flopée d’instruments de musique absurdes conçus par Maywa Denki.

Voilà  un spectacle, cocasse et poétique, qui s’adresse à  un très large public.

Pierre MOUTARDE

[->http://www.maisondeladanse.com/programmation/saison2014-2015/robot]

Chroniques cinéma  » Un homme idéal « 

de Yann Gozlan

avec Pierre Niney, Ana Girardot,

Français 1h35. 2015.

Un thriller à  moitié réussi sur une usurpation et un plagiat littéraire. La réalisation est soignée, Pierre Niney très convaincant mais le scénario manque en 2ème partie de profondeur psychologique.

Mathieu, 25 ans, travaille comme déménageur mais se rêve en auteur. Son dernier manuscrit a été refusé. Au cours d’un déménagement, il découvre le journal d’un ancien soldat de la guerre d’Algérie enveloppé de cuir. Le vieux monsieur est mort sans héritiers. Une idée germe dans la tête du jeune homme puis est vite concrétisée : il tape le document sur son ordinateur, l’envoie, il est accepté par une maison d’éditions. Bingo ! Le voilà  auteur reconnu, le livre s’arrache, il est riche, trouve même l’amour avec Alice, une jeune historienne. Ce rêve éveillé pourrait continuer sans problèmes. Personne n’a deviné la supercherie, pas même ses beaux-parents, famille bourgeoise passant des vacances idylliques dans leur villa somptueuse de la Cote d’Azur avec Mathieu et Alice bien entendu. Personne ? Si justement le filleul de son beau-père, secrètement amoureux de la femme de Mathieu et qui flaire la supercherie. Et puis aussi, un homme croisé à  une séance de dédicaces à  Nice, qui a connu le soldat d’Algérie et qui sait que Mathieu a volé son succès.

Un climat angoissant commence à  nimber ce « beau conte de fées ». D’autant que l’éditeur de Mathieu le presse de lui envoyer un deuxième ouvrage. Le jeune homme n’arrive pas à  aligner deux mots sur la page blanche, et pour cause, et il sent l’étau se resserrer.

La deuxième partie du film est consacrée à  la manière dont le déménageur-écrivain va se défaire de ce piège dans lequel il s’est enferré. Et si la première partie de l’histoire s’attachait à  brosser un portrait psychologique du personnage, à  décrire la création littéraire, les problèmes d’inspiration, d’écriture, la seconde bascule dans les codes du polar avec assassinat, cadavres à  cacher, accident maquillé, identité usurpée. Finalement Mathieu n’a pas réussi à  être un écrivain, comme il ne réussit pas à  sortir de son dilemme sauf à  imaginer de faire disparaître ses contradicteurs et lui-même : assassinat pour eux, faux- accident pour lui. Il va bien réussir à  la fin de son séjour à  écrire un méta-roman sur ses difficultés d’écrivain justement…Mais on ne croit pas vraiment à  cet ouvrage rédigé en quelques jours.

La fin du film (que je ne dévoile pas) est jolie, bien imaginéemais on reste sur sa faim, mi-figue, mi-raisin

Yann Gozlan sait filmer, ses plans sont léchés, il sait tenir une caméra et on ne boude pas ce plaisir visuel. Le choix de tous les comédiens est très bon. Pierre Niney (Mathieu) est excellent dans ce rôle de présence-absence, on pense à  Anthony Perkins. Ana Giradot (Alice) est absolument craquante. Tous deux iront loin ! André Marcon et Valéria Cavalli jouent à  merveille le rôle des beaux-parents aimants.

On aurait aimé un vrai thriller psychologique pour mieux comprendre les arcanes de l’imposture et du plagiat littéraire. Mathieu avait affiché la photo de Romain Gary dans son studio. Le passé de l’écrivain aurait dû davantage inspirer Yann Gozlan. C’est tout un art de mentir !

LE SOULIER DE SATIN

DE PAUL CLAUDEL

AU POINT DU JOUR , La TROISIEME JOURNEE DU SOULIER DE SATIN DE PAUL CLAUDEL ,mise au point progressivement de jour en jour, pendant le mois de mars, sous la direction de Kathleen Dolle ..,et avec une troupe de douze jeunes comédiens ,tous pleins de talent et de « punch ».

Ils sont issus de l’Ecole de la Comédie de Saint-Etienne, et réunis sous le nom d’un collectif :X .Gageons qu’X est la promesse tenue d’une grande école, mais n’est pas très explicite, pour une équipe qui justement mérite d’être connue. L’équipe technique bénéficie d’anciens élèves de l’ENSATT. Un esprit de troupe, sans prétention, sensible dès l’accueil ,chaleureux, où les comédiens vous expliqueront le contenu des deux journées précédentes, à  l’aide de grands panneaux pédagogiques ,qui vous permettront de comprendre la continuité d’un récit où le « zapping » le dispute à  la cohérence d’une œuvre monumentale,(chaque journée de la version scénique dure plus de deux heures) où se confrontent ciel et terre ,dans un désordre organisé .

La dimension mystique est ancrée dans le réel, laissant libre cours à  tous commentaires et interprétations qui ont fait la réputation mythique de cette pièce à  laquelle peu de metteurs en scène (et les plus grands : Jean Louis Barrault, Antoine Vitez, Olivier Py) se sont confrontés avec bonheur.
L’entreprise est un véritable challenge, poursuivi depuis début janvier (chaque journée est présentée, pendant un mois, tous les jours sauf le dimanche et le lundi) .Le mois de mars est celui de la troisième journée.

Le projet s’insère dans le cadre du Théâtre Permanent, à  l’initiative de Gwénael Morin, qui selon le même principe nous a présenté l’an dernier Molière et Shakespeare. Le soutien de l’ADAMI,de la DRAC Rhône-Alpes, du ministère de la Culture et des collectivités locales permet au théâtre réputé éphémère d’être permanent et à  la portée de tous (le billet est à  cinq euros et vous donne le droit de revenir pendant tout le mois !)Un journal quotidien, disponible, retrace les événements du jour, et vous pouvez le matin participer à  leur travail, et surtout vous pouvez les rejoindre à  20h, au Théâtre du Point du Jour. Une très belle aventure que le public doit absolument soutenir, pour son plus grand plaisir et pour que le théâtre retrouve sa place dans la Cité.

Venez nombreux et vous pourrez ainsi suivre les aventures, à  travers le monde (la scène de ce drame est le monde, au XVIème siècle,) de Dona Prouhèze et de Rodrigue, unis par un amour impossible, errant entre Afrique (le Maroc) et la Nouvelle Amérique. La terre, dont les grands navigateurs espagnols ont repoussé les limites, n’est plus depuis peu le centre du cosmosDix ans séparent la deuxième et la troisième Journée, avec une lettre qui mettra ce temps pour atteindre son destinataire. Plus de vingt personnages ,hauts en couleur ,à  travers plus de dix scènes ,sous forme de tableaux ,évoluent pour vous faire vivre cette merveilleuse histoire, d’un continent à  l’autre, dans un langue flamboyante (véritable « opéra de paroles »),empruntant tous les styles: épique,poétique,lyrique,symbolique,comique.

Priorité au texte, que les comédiens servent avec efficacité. Le souffle poétique de Claudel demande justement une parfaite maitrise de la respiration, et ils ont su la trouver de telle sorte que l’absence de costume et de décor, (en dehors des très beaux vitraux de fond de scène au début) vient en renforcement de l’écoute .A chacun son imaginaire simplement guidé par une scénographie, marquée par une mise en place, qui permet quelques belles compositions.

Le Soulier de Satin, ou en sous-titre : « Le pire n’est pas toujours sûr » .Ceux qui pensent que le théâtre n’a pas d’avenir, ce qui serait le pire, venez applaudir ce spectacle et donner du poids à  cet aphorisme, emprunté à  Calderon. Puissions-nous ainsi être sûr que le Point du Jour annonce l’aurore d’un théâtre d’Art permanent pour tous.

Hugues Rousset

Chroniques cinéma – « Selma »

de Ava DuVernay

avec David Oyelowo, Tim Roth

Film américano-britannique 2h08 2015.

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Un film beau et fort sur un moment de la vie de Martin Luther King : la marche des noirs pour le droit de vote à  Selma en Alabama il y a tout juste 50 ans. Pédagogique et mémoriel.

Mieux que de réaliser un biopic sur toute la vie de Martin Luther King, Ava DuVernay a choisi de raconter un épisode important de son combat pour les droits civiques des noirs, celui qui s’est déroulé il y a tout juste 50 ans en Alabama. Le droit de vote pour eux a été signé au niveau fédéral mais dans cet état ségrégationniste du sud, le gouverneur, un certain Georges Wallace, s’oppose à  son application.
Martin Luther King vient soutenir l’action de la communauté noire de Selma et propose sa méthode : manifestations, résistance, non-violence. Mais comment résister quand la police locale empêche toute marche dans les rues, charge violemment avec matraques et armes de poings ?

Ce sera le fameux « Bloody Sunday » du 7 mars 1965 ou 700 noirs sur le pont Edmund Pettus ont été attaqués.
Martin Luther King va essayer de négocier, s’expliquer avec le Président Lyndon Johnson, le gouverneur, les responsables noirs locaux et c’est la fameuse marche de Selma à  Montgomery, la capitale de l’Etat qui sera décidée en y associant « tous les hommes de foi et de bonne volonté ». 20% de blancs y participeront dont des pasteurs de l’Est des Etats-Unis, des acteurs et des chanteurs connus. Les images des actualités de l’époque qui clôturent le film d’Ava DuVernay témoignent de l’impact que cette action a eu dans le pays et dans le monde.

Une loi en juillet 1965 assurera aux noirs un droit de vote dans tout le pays, sans exception. Enfin

Selma, ce film réalisé en cette année anniversaire résonne douloureusement alors que les Etats-Unis viennent de connaître de nombreux actes racistes. Il vient montrer à  quel point la communauté noire a souffert au prix de nombreuses morts pour acquérir et obtenir enfin l’égalité des droits civiques. Il montre aussi combien ce combat devait faire face aux forces conservatrices voire racistes des gens du Sud, mais aussi au jeu politique d’un Lyndon Johnson embourbé dans la guerre du Vietnam, au poids du FBI qui pouvait détruire voire éliminer un opposant aux « intérêts du pays ».

Dans cette âpre bataille, Martin Luther King puise dans sa foi et l’idée qu’il se fait de sa mission les arguments pacifiques et politiques de son engagement. Le film n’hésite pas à  montrer ses doutes, ses craintes, mais aussi son indéniable charisme et ses talents d’orateur toujours nourri des passages de la Bible. Le film est de facture classique et s’attache à  monter les arcanes difficiles des enjeux politiques, sociaux, communautaires du problème. En ce sens, il est très pédagogique.

C’est David Oyelowo, acteur de théâtre britannique qui lui prête ses traits et lui donne une vraie dimension humaine et dramatique, sans tomber dans le mimétisme du leader noir.
Une minutieuse reconstitution des décors, des costumes, de la musique de l’époque apporte une authenticité et en fait un beau film mémoriel aux accents poignants.

Chroniques cinéma – « Le dernier coup de marteau »

d’Alix Delaporte

avec Clothilde Hesme Romain Paul,Grégory Gadebois.

(Drame français 1h24 2015).

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Un drame intimiste et l’éveil d’un adolescent au monde des émotions grâce à  la musique et à  la rencontre avec un père inconnu. Une révélation : le jeune comédien Romain Paul.

Lorsque Victor, 13 ans, apprend que son père, qu’il n’a jamais connu, est revenu vivre à  Montpellier où il habite avec sa mère, il veut le rencontrer. D’abord réticent, le géniteur bourru et solitaire va peu à  peu se prendre d’intérêt pour cet ado qui ne désarme pas et passe outre ses refus. Car il faut dire que Samuel Rovinski, ce « papa nouveau » est imposant puisqu’il dirige d’une main de fer l’orchestre de l’Opéra de Montpellier
Victor est bien loin de ce faste et de ce monde culturel. Il habite loin de la ville au bord de la mer sur un terrain vague dans une caravane avec sa mère Nadia, lourdement malade. Lui, ce qu’il aime, c’est le football. D’ailleurs doué pour ce sport, il vient d’être pressenti pour entrer au centre de formation des jeunes du club de Montpellier. Mais il rechigne à  l’annoncer à  sa mère, aux modestes moyens ; secret, et doutant de l’issue fatale que la maladie de sa mère pourrait connaître, il tait ses sentiments, ses craintes, ses émotions.

Et c’est justement avec ce père qu’il va s’éveiller au monde sensible. Samuel Rovinsky lui fait écouter la 6ème symphonie de Mahler dite « Des trois coups de marteau ». Les coups du destin. Et lui le fils mutique va s’ouvrir à  cet univers musical où les sentiments sont exprimés par une mélodie, des instruments : il aura enfin quelque chose à  dire et à  partager avec sa mère.

C’est un très joli film, sensible, fait de petites touches qui nous est offert là La lumière du midi irradie chaque plan, alors que la vie semble abandonner le corps de la mère de VictorEn découvrant le monde de l’opéra, celui de son père, le jeune garçon laisse s’exprimer cette partie de lui qu’il ne connaissait pas. Et en en même temps ce père, dur, à  la limite du mépris pour ses musiciens, s’humanise à  son contact.
Les plans sont courts et nous font passer sans cesse d’un univers à  l’autre, en suivant précisément ce va- et-vient existentiel de Victor, ce jeu de balancier entre sa mère et son père.

C’est le deuxième film d’Agnès Delaporte, une jeune cinéaste qui avait tourné « Angèle et Tony ». Le jeune Romain Paul qui interprète le rôle de Victor est d’une présence étonnante, c’est une vraie révélation. Il a d’ailleurs reçu le prix Marcello Mastroianni du jeune espoir à  la Mostra de Venise 2014.
Clothilde Hesme est d’une sensibilité à  fleur de peau, très touchante.
La « petite musique » de ce « Dernier coup de marteau » résonne longtemps après le mot fin du générique.